You are currently viewing Harcèlement au travail et conflits : quelles différences ?

Dans le cadre de ma mission en tant que psychologue du travail, je rencontre souvent des personnes qui ont souffert au travail. Harcèlement au travail est le premier mot mis en avant.

Il y a une confusion fréquente parmi les personnes que j’accompagne concerne la distinction entre le harcèlement au travail et le conflit.

Je m’en réjouis, la notion harcèlement s’est démocratisé, et on peut maintenant plus facilement mettre des mots sur nos maux. Néanmoins, attention à ne pas confondre avec le conflit. Cette distinction est cruciale car elle conditionne non seulement la manière dont on aborde le problème, mais aussi les mesures correctives à mettre en place, et surtout la marge de manœuvre que l’on a à pouvoir faire autrement.

Conflit ou harcèlement ? J’en parles dans cette vidéo. Abonnez-vous pour rester informé …

Harcèlement au travail : Comprendre la gravité de la situation

Le harcèlement au travail se caractérise par des comportements répétés qui visent à dégrader, humilier, intimider ou abuser une personne ou un groupe. Ces actions sont intentionnelles et ont souvent un impact négatif profond sur la santé mentale et physique de la victime. Voici quelques points clés à retenir :

  • Répétitivité et durée : Le harcèlement implique des actions répétées sur une période prolongée. Il ne s’agit pas d’un événement isolé, mais d’un ensemble de comportements qui créent un environnement hostile.
  • Intention de nuire … ou pas : Contrairement à un simple conflit, le harcèlement a souvent pour objectif explicite de nuire à l’autre personne, qu’il s’agisse de la déstabiliser psychologiquement ou de porter atteinte à sa dignité. Comme je l’explique dans un autre article, l’intention de nuire peut manquer à l’appel, surtout lorsque personne ne s’exprime. En effet, le harcèlement peut partir de représentation sociale, de croyance, d’habitudes, … qui bien souvent sont inconscientes.
  • Conséquences juridiques : Le harcèlement est reconnu légalement et peut entraîner des sanctions sévères pour l’auteur et l’entreprise (et donc son ou sa dirigeant.e) qui n’aura pas respecté son obligation de sécurité de ses salariés. Il est important de le signaler rapidement aux ressources humaines ou à une autorité compétente.

J’ai écris un article beaucoup plus détaillé à ce sujet “Comprendre et agir face aux agissements sexistes, hostiles et aux harcèlements moral et sexuel au travail”. Si vous ne l’avez pas encore lu c’est le moment.**

Exemple de harcèlement moral au travail

Marie est une employée dans une entreprise de marketing depuis trois ans. Elle a toujours reçu des évaluations positives pour son travail et est généralement bien considérée par ses collègues. Cependant, il y a six mois, elle a commencé à avoir des problèmes avec son nouveau supérieur hiérarchique, Paul.

Comportements de harcèlement

  1. Critiques Constantes et Injustifiées : Paul critique systématiquement le travail de Marie, même lorsque les résultats sont conformes aux attentes de l’entreprise. Il la réprimande en public, soulignant de manière excessive des erreurs mineures ou inventées.
  2. Isolement social : Paul organise des réunions d’équipe sans inclure Marie.Il omet de l’informer des décisions importantes qui concernent son travail. Il encourage également d’autres collègues à ne pas interagir avec elle en la décrivant comme « difficile à gérer ».
  3. Dénigrement et humiliation : Lors des réunions d’équipe, Paul fait des commentaires sarcastiques sur les compétences de Marie, la tournant en dérision devant ses collègues. Il remet en question sa capacité à gérer des projets importants, ce qui mine sa confiance en elle.
  4. Surcharge de travail délibérée : Paul assigne à Marie des tâches supplémentaires irréalisables dans le temps imparti, tout en lui retirant les ressources nécessaires pour accomplir son travail. Lorsque Marie exprime ses préoccupations, Paul l’accuse de ne pas être capable de gérer la pression.
  5. Menaces et intimidation : Paul insinue régulièrement que si Marie ne « s’améliore » pas rapidement, elle pourrait perdre son emploi. Ces menaces ne sont jamais formelles mais visent à instaurer un climat de peur et d’insécurité.

Conséquences

Marie commence à ressentir des symptômes de stress intense, y compris des troubles du sommeil et de l’anxiété. Elle devient réticente à se rendre au travail, et sa performance en souffre. Le climat de travail devient de plus en plus toxique, non seulement pour elle mais aussi pour l’équipe, qui est témoin de ces comportements.

Conflit au travail : Une opportunité de croissance

Le conflit au travail, en revanche, est une divergence d’opinions ou d’intérêts entre deux parties ou plus. Il n’est pas nécessairement négatif et peut même être constructif lorsqu’il est bien géré. Voici comment différencier un conflit d’un cas de harcèlement :

  • Caractère occasionnel : Les conflits surviennent souvent de manière ponctuelle et peuvent être résolus par la discussion et le compromis.
  • Absence d’intention malveillante : Contrairement au harcèlement, le conflit n’a pas pour but de nuire à l’autre. Il peut résulter de malentendus, de différences de perception ou de styles de communication divergents.
  • Potentiel d’amélioration : Lorsqu’il est bien géré, un conflit peut renforcer les relations professionnelles en clarifiant les attentes et en améliorant la communication.

Exemple de conflit au travail :

Jean est assistant maternel dans une école primaire. Il est généralement apprécié pour son professionnalisme et sa gentillesse. Un jour, un professeur vient le voir au sujet d’une situation rapportée par un enfant.

Situation de conflit

  1. Accusation inattendue : Un professeur informe Jean qu’un enfant de l’école a affirmé qu’il lui avait volé son goûter. Jean est surpris, car il ne connaît même pas cet enfant et n’intervient pas dans sa classe.
  2. Confusion et incertitude : Jean et le professeur décident de parler à l’enfant. Lors de leur entretien, l’enfant déclare qu’il ne se rappelle plus de l’incident. Jean pense que l’affaire est close, même s’il est troublé par l’accusation initiale.
  3. Intervention de la directrice : Deux semaines plus tard, la directrice de l’école convoque Jean pour lui demander de ne pas parler de l’incident à qui que ce soit, bien qu’elle n’explique pas pourquoi. Jean, décontenancé, ne pose pas de questions mais se sent de plus en plus isolé et incompris.
  4. Sentiments de victimisation : Jean commence à se sentir victime de harcèlement. Il perçoit une atmosphère de méfiance autour de lui et ressent que les gens ne sont pas honnêtes avec lui. Cette situation crée un stress important pour Jean, qui n’a jamais été confronté à un tel problème auparavant.
  5. Conséquences sur la santé : Le stress accumulé finit par affecter sa santé. Un jour, Jean s’évanouit à l’école et décide de consulter un médecin. Épuisé par la situation, il exprime à son médecin qu’il ne souhaite plus travailler dans cette école.
  6. Absence de communication : Jean n’a jamais exprimé ses ressentiments à la directrice ou à ses collègues, ce qui contribue à une escalade du conflit interne. La situation s’envenime du fait de ce manque de communication, renforçant son sentiment de solitude et d’incompréhension.

Discussion :

Ce conflit illustre comment des différences de priorités et de communication peuvent conduire à des tensions au travail. Une gestion appropriée et une communication ouverte peuvent transformer ces conflits en opportunités de collaboration et d’amélioration. Bien gérés, les conflits renforcent les relations professionnelles et mènent à des résultats bénéfiques pour l’équipe et l’organisation dans son ensemble.

Une médiation en entreprise : un outil qui permet de désamorcer les conflits, et limiter le turnover

Identifier et agir : Le rôle du psychologue du travail

En tant que psychologue du travail, j’ai pour mission d’accompagner les entreprises et leurs collaborateurs dans la gestion de ces situations délicates. Voici nos recommandations pour différencier et traiter le harcèlement et le conflit :

  1. Évaluation précise de la situation : Pour évaluer la nature des comportements en question, recueillez des informations détaillées et objectives, ce qui est essentiel. »
  2. Sensibilisation et formation : Former les employés et les managers à reconnaître les signes de harcèlement et à comprendre la dynamique des conflits est crucial pour une intervention précoce.
  3. Médiation et résolution : Pour les conflits, nous encourageons la médiation et le dialogue comme moyens de résolution. Pour le harcèlement, il est indispensable de prendre des mesures formelles pour protéger la victime.
  4. Support et accompagnement : Offrir un soutien psychologique aux personnes affectées est essentiel pour leur bien-être et leur réintégration positive dans l’environnement de travail.

À chacune de mes interventions en tant que médiatrice, les résultats qu’une médiation bien menée peut avoir me surprennent et m’impressionnent toujours.

Une personne qui venait au travail la boule au ventre et le cœur serré ne ressentait plus cela après le premier rendez-vous avec les deux parties séparément.

La clé : comprendre les besoins, les points de vue de chacun et avoir un espace d’échanges sécurisé.

La communication bienveillante (ou Communication Non Violente), est un outil très puissant pour désamorcer ce genre de situation. J’en parle dans cet article : “3 raisons pour apprendre à communiquer en entreprise

Contactez-moi via le formulaire en cliquant ici (en bas de page) ou via LinkedIn si vous vous intéressez à un accompagnement en ce sens.

Si vous avez d’autres demandes ou questions, n’hésitez pas à me le faire savoir !

Conclusion

La distinction entre harcèlement et conflit au travail est fondamentale pour adopter une approche adéquate et efficace. L’idée est d’apprendre à créer des environnements de travail sains et à favoriser le mieux-être des individus, des équipes et donc des organisations de travail. En reconnaissant et en adressant correctement ces situations, nous pouvons transformer des défis en opportunités de croissance et de développement. L’idée est vraiment de pouvoir conscientiser ce qui se passe, l’analyser et faire autrement. Être accompagné aide dans ces démarches. Car conscientiser demande un certain effort de remise en question de ce qui est une habitude chez chacun de nous. C’est justement le rôle des psychologues, être ce miroir et ce guide vers quelque chose de meilleure.

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